Exposition Renouveau

Agape Art vous invite à vivre l’interpellation de Martin Luther King, Jr à travers sa nouvelle exposition «Renouveau». Le célèbre prédicateur et artiste oratoire lance le défi à ces contemporains ainsi qu’à nous de vivre une vie transformée. Voici le texte de sa célèbre prédication « Tu dois naitre de nouveau » (traduction, Mathilde Amoureux).

« Si vous me le permettez, je vais prêcher, juste un peu »

Une nuit, un théologien juif est venu voir Jésus par crainte de ses collègues. Il voulait savoir comment être sauvé. Jésus ne s’est pas laissé enlisé dans des explications trop théologiques ni moralistes en lui prodiguant une liste de permission ou d’interdiction. Jésus ne lui dit pas : “Maintenant, Nicodème, tu dois cesser de mentir”. Il ne dit pas “Nicodème, tu dois cesser de tricher, si tu le fais”. Il ne dit pas, “Nicodème, tu ne dois pas commettre l’adultère”. Il ne dit pas non plus : “Nicodème, maintenant tu dois arrêter de boire de l’alcool “. Il dit quelque chose de radicalement différent, parce que Jésus connaissait une réalité fondamentale – que si un homme ment, il volera. Que si un homme vole, il tuera. Ainsi, au lieu de se focaliser sur l’aspect moral de la vie humaine, Jésus le regarde et lui dit : «Nicodème, tu dois naître de nouveau». En d’autres termes, il lui dit : «Ton cœur à besoin d’être changé, ta personne entière doit être transformée».
Une nation qui fait des Noirs des esclaves pendant 244 ans les « chosifie », c’est-à-dire les transforme en objet. Bref, les déshumanise. Par conséquent, elle va abuser d’eux économiquement. Une nation qui pratique l’exploitation économique devra se lancer dans des investissements à l’étranger et ainsi de suite et elle devra utiliser sa puissance militaire pour protéger des intérêts. Tous ces problèmes sont intrinsèquement liés. Ce que je dis aujourd’hui c’est que nous devons quitter cette convention en proclamant : « Amérique, tu dois naître de nouveau ».

Conclusion

Donc je conclurai en répétant qu’aujourd’hui nous avons une tâche urgente à accomplir : celle de sortir d’ici rempli d’un « mécontentement divin ». Soyons mécontents jusqu’à ce que l’Amérique cesse d’avoir de la tension artérielle dans son credo et de l’anémie dans ses actions. Soyons mécontents jusqu’à ce que le bélier des forces de la justice abatte le mur qui sépare les beaux quartiers d’aisance et de confort, des faubourgs de pauvreté et de désespoir. Soyons mécontents jusqu’à ce que ceux qui vivent à l’orée de l’espoir soient accueillis dans la métropole de la sécurité quotidienne. Soyons mécontents jusqu’à ce que les bidonvilles soient rejetés dans le dépotoir de l’histoire et que chaque famille vive dans un foyer décent et sanitaire. Soyons mécontents jusqu’à ce que les sombres jours de la ségrégation scolaire soient transformés en lendemains radieux d’une éducation intégrée de qualité.
Soyons mécontents jusqu’à ce que l’intégration ne soit plus considérée comme un problème, mais comme l’occasion de participer à la beauté de la diversité. Soyons mécontents jusqu’à ce qu’hommes et femmes, si noirs soient-ils, soient jugés en fonction de leur caractère et non de la couleur de leur peau.
Soyons mécontents. Soyons mécontents jusqu’à ce que chaque état soit dirigé par un gouverneur plein de compassion, qui juge équitablement et marche humblement avec son Dieu. Soyons mécontents jusqu’à ce que dans chaque mairie, « la justice se déverse comme de l’eau et la rectitude comme un courant puissant ». Soyons mécontents jusqu’à ce que « le lion et l’agneau dorment côte à côte, et que chaque homme s’assied sous sa vigne et son figuier, sans aucune peur ». Soyons mécontents et l’homme reconnaîtra que c’est d’un « seul sang que Dieu a créé les hommes qui peuplent la surface de la Terre ». Soyons mécontents jusqu’au jour où plus personne ne criera « White power », où plus personne ne criera « Black power » – mais où tout le monde parlera de la puissance de Dieu et de la dignité humaine. Je dois l’avouer, mes amis, la route ne sera pas toujours facile. Il y aura encore les passes rocailleuses de la frustration et les méandres de la confusion. Il y aura des revers inévitables, ici et là. Il y aura ces moments, où, l’allégresse de l’espoir, fera place à la fatigue du désespoir. Nos rêves seront parfois brisés, et nos espoirs éthérés anéantis. Peut-être devrons-nous encore, les yeux mouillés de larmes, nous tenir devant la bière d’un courageux défenseur des droits civiques, dont la vie aura été fauchée par l’acte ignoble d’une population assoiffée de sang. Aussi difficile et douloureux que cela soit nous devons marcher vers les jours prochains, porteur d’une foi audacieuse dans l’avenir. Et alors que nous poursuivons le chemin tracé pour nous, nous pourrons trouver consolation dans les mots si noblement laissés par ce grand barde noir qui a aussi été un grand combattant de la liberté, James Weldon Johnson :

Rocailleuse était la route que nous avons parcourue,
Amère était la tige punitive
Subie au temps
Où l’espoir mourait avant de naître.

Pourtant, à un rythme régulier,
Nos pieds ne nous ont-ils pas
Porté à cet endroit
Tant espéré par nos pères ?

Nous sommes venus par le sentier
Arrosé de larmes
Nous avons parcouru notre chemin
Dans le sang du carnage,

Hors du passé obscur
Pour nous tenir enfin
Dans le rayon brillant
De notre étoile brillante.

Que cette affirmation soit notre cri vibrant. Elle nous donnera le courage d’affronter les incertitudes de l’avenir. Elle donnera à nos pieds fatigués une force nouvelle pour poursuivre notre chemin vers la liberté. Quand les nuages du désespoir planent sur nos mornes journées et que nos nuits sont plus sombres que mille minuits, rappelons-nous qu’il y a une force créatrice dans cet univers, qui travaille à abattre la gigantesque montagne du mal, une force capable de nous tirer de l’impasse et transformer les jours obscurs en lendemains radieux. Prenons conscience que l’arc moral de l’univers est long, mais qu’il tend vers la justice. Reconnaissons que William Cullen Bryant a raison : « la vérité écrasée par terre renaîtra ». Sortons en reconnaissant que la Bible est dans le vrai : “Ne vous y trompez pas : on ne se moque pas de Dieu. Ce qu’un homme aura semé, il le moissonnera aussi”. Ceci est notre espoir pour l’avenir, et avec cette foi, nous pourrons chanter lors d’un lendemain prochain et dans un passé composé cosmique : « Nous avons triomphé, nous avons triomphé, au fond de mon cœur, je savais que nous triompherions ».